Les parties communes sont « affectées à l’usage ou à l’utilité de tous les copropriétaires » (article 3 de la loi du 10 juillet 1965). Chaque copropriétaire peut donc utiliser librement les parties communes de son immeuble à condition de respecter la destination de l’immeuble et les droits des autres copropriétaires en ne causant pas de troubles anormaux du voisinage. Pour garantir cette jouissance à tous les copropriétaires, le règlement des copropriétaires interdit fréquemment l’encombrement des parties communes. Même lorsque ledit règlement est silencieux, les juges considèrent qu’un tel encombrement porte atteinte à la libre jouissance des autres copropriétaires.
I/ L’action du syndic de copropriété
En principe, le syndicat des copropriétaires a pour rôle de veiller à la sauvegarde des droits afférents à l’immeuble et de faire respecter le règlement de copropriété. Toutefois, seul le syndic peut agir en justice au nom et pour le compte dudit syndicat.
Avant d’initier toute procédure à l’encontre du copropriétaire à l’origine de l’encombrement des parties communes, lorsque son identité est connue, le syndic doit lui rappeler ses obligations contractuelles et peut, sur demande d’un copropriétaire et par le biais d’une lettre recommandée avec accusé de réception, le mettre en demeure de libérer les parties communes. Ce n’est que si le copropriétaire n’agit pas à la suite de cette mise en demeure que le syndic doit intenter une action en justice. Il a alors le choix entre deux procédures :
- La procédure en référé : le syndic peut se passer de l’autorisation de l’assemblée générale pour intenter une telle action si aucune contestation ne semble possible, notamment en cas de violation du règlement de copropriété. En cas d’encombrement des parties communes occasionnant un trouble manifestement illicite, le juge des référés apprécie souverainement le choix de la mesure propre à faire cesser le trouble qu’il constate (2ème civ., 15 novembre 2007, no 07-12.304). Le syndic de copropriété peut demander au juge des référés sur le fondement de l’article 835 du code de procédure civile de prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
- La procédure au fond : le syndic peut choisir d’engager une telle procédure en lieu et place du référé ou en cas d’échec dudit référé. Il doit alors obtenir l’autorisation de l’assemblée générale des copropriétaires. La résolution doit être inscrite à l’ordre du jour de l’assemblée générale et votée à la majorité simple de l’article 24 de la loi de 1965.
Dans la majorité des cas, le juge condamne le copropriétaire à libérer les parties communes et éventuellement à verser des dommages-intérêts (Cour d’appel d’Aix en Provence, 26 novembre 2020, n° 19/13054) notamment lorsque les copropriétaires subissent un préjudice avéré tel que des nuisances olfactives liées à l’encombrement des parties communes. Le juge pourra également décider d’appliquer une clause pénale qui existerait dans le règlement de copropriété et éventuellement réduire son montant s’il est trop élevé. Le juge a ainsi pu retenir que devait s’appliquer le règlement de copropriété qui précisait qu’aucun des copropriétaires ne pouvait encombrer les parties communes, lesquelles devaient être dégagées de tout objet quelconque, et que chaque procès verbal dressé par le garde assermenté de la copropriété donnerait lieu au versement à la copropriété d’une somme à titre de dommages-intérêts (3ème civ., 30 octobre 1973, 72-12.890). Toutefois, il est bon de préciser qu’en cas de silence du règlement de copropriété quant à l’interdiction d’encombrer les parties communes, le juge peut rejeter la demande lorsque l’encombrement ne se trouve pas dans un lieu de passage (Cour d’appel de Paris, 9 avril 2014, n°10/07878).
II/ L’action d’un copropriétaire
Un copropriétaire peut entamer seul la procédure dans plusieurs cas :
- Lorsqu’il subit un préjudice personnel tel que l’impossibilité d’utiliser normalement ses parties privatives,
- Lorsque le syndic n’obtient pas l’autorisation de l’assemblée ou encore,
- En cas de carence du syndic alors même qu’il y a une atteinte au règlement de copropriété. En effet, chaque copropriétaire peut exiger le respect du règlement de copropriété ou qu’un autre copropriétaire cesse de porter atteinte aux parties communes sans qu’il ne soit nécessaire pour lui de prouver un préjudice personnel (3ème civ., du 17 novembre 2004, n°03-10.039).
A l’instar du syndic, il devra envoyer une lettre recommandée avec avis de réception au copropriétaire à l’origine de l’encombrement ainsi qu’une copie au syndic. Si la mise en demeure reste sans réponse, le copropriétaire aura alors le choix entre la procédure en référé ou la procédure au fond. Concomitamment à cette action, il peut également agir contre le syndic en réparation de sa carence puisque « le syndic, investi du pouvoir d’administrer et conserver l’immeuble en copropriété, est responsable, à l’égard de chaque copropriétaire, des fautes commises dans l’accomplissement de sa mission » (3ème civ., 6 mars 1991, n°89-18.758).
III/ Le cas particulier du locataire
Par principe, le locataire est le principal responsable des troubles de voisinage. Cependant, le propriétaire s’engage à faire cesser les nuisances de son locataire. Tel est le cas notamment concernant l’encombrement des parties communes que cela concerne les parties communes dont le locataire a un usage quasi-exclusif ou le hall de l’immeuble étant donné qu’il s’agit dans les deux cas de parties communes (Cour d’appel de Paris, 11 avril 2013, n° 12/12115).
Le propriétaire doit avoir été mis en demeure et informé des nuisances de son locataire par le biais d’une lettre recommandée avec accusé de réception par l’un des copropriétaires ou par le syndic. L’encombrement des parties communes doit être certain et démontré (Cour d’appel de Paris, 11 avril 2013, n° 12/12115). Par conséquent, la mise en demeure doit être justifiée par divers éléments tels que des témoignages, une pétition ou encore un constat d’huissier.
Le propriétaire a alors deux possibilités :
- La résolution à l’amiable du litige : le propriétaire met en demeure son locataire de libérer les parties communes.
- La résiliation du bail : si l’encombrement persiste, le propriétaire peut faire constater la résiliation du bail dès lors que ce dernier contient une clause de résiliation pour nuisances. Le juge a pu considérer que la preuve de l’encombrement par des plaintes au syndic de la copropriété et des photographies des éléments encombrant les parties communes suffisait pour constater que le congé donné au locataire reposait sur des motifs légitimes et sérieux (Cour d’appel de Lyon, 21 juin 2016, n° 15/07897). En l’absence d’une telle clause, le propriétaire peut demander la résiliation du bail sur le fondement de l’article 1729 du code civil.
Toutefois, le propriétaire qui enlèverait les encombrants sans autorisation judiciaire pourrait voir sa responsabilité engagée (3ème civ., 7 décembre 2017, n°16-21.950 : « le bailleur ne pouvait, sans mise en demeure préalable et sans autorisation judiciaire, se substituer à la locataire dans l’exécution des obligations contractuelles lui incombant »). Cela laisse à penser qu’une telle solution pourrait être retenue à l’encontre du syndic qui enlèverait les encombrants de son propre chef. Si le propriétaire n’agit pas, les copropriétaires peuvent saisir le tribunal pour engager sa responsabilité pour défaut d’entretien des parties communes ou en violation du règlement.